"L’exit tax ne présente pas de coûts majeurs pour la plupart des contribuables" Olivier Piétri

PATRIMOINORAMA Que pensez-vous de l’évolution des dernières mesures fiscales en France ?

Olivier Piétri, Consultant Sénior en Fiscalité , Ancien Inspecteur Général des Impôts

"La fiscalité française est devenue une véritable machine à gaz de plus en plus complexe. En 2011, nous avons eu droit en France à 4 lois de Finances rectificatives. C’est énorme ! Après la première loi rectificative en Février cette année, nous en aurons quel que soit le candidat élu une seconde cet été. Et à nouveau, nous sommes toujours dans l’expectative et dans l’attentisme.
La pression fiscale s’est très rapidement alourdie sur le patrimoine depuis 2008 :
La fiscalité sur les plus values immobilières a progressé entre 2010 à 2012 de 27% à 32,50%, celle sur les intérêts de capitaux financiers de 19 à 24% en 3 ans, sur les dividendes de 19% à 21% sur la même période.
Jusqu’à présent, on était régulièrement soumis à de forts changements fiscaux tous les trois ans, tous les deux trois mois actuellement. Nos clients acceptent de faire des efforts dans la conjoncture actuelle cependant l’absence de visibilité et de stabilité fiscale est très mal perçue et vécue."

PATRIMOINORAMA Quelle attitude conseillerez-vous ?

Olivier Piétri:

"J’ai une expérience de 25 ans comme Inspecteur des Impôts au sein de l’administration fiscale, depuis 6 ans je conseille au sein de mon cabinet de conseiller fiscal plus d’une centaine de CGP et quelques clients fortunés. La fiscalité est vraiment un sujet toujours très vivant.
Nous sommes tous conscients que la lutte pour la réduction des déficits va s’accélérer après les élections et que la réduction des niches fiscales va s’accentuer après les élections quelle que soit l’issue du scrutin.
En matière de donations, il ne faut pas attendre pour effectuer des « dons Sarkozy » avant le 1er Juin. Attention aussi aux pièges concernant la réglementation sur la fraude fiscale mise en place récemment.
L’exit tax ne présente pas à ce jour de coûts majeurs pour la plupart des contribuables mis à part des tracasseries administratives supplémentaires.
Il faut s’attendre par ailleurs à un alourdissement de la CSG quel que soit l’issue de l’élection à 15.5% pour cet été, texte déjà voté avec la TVA sociale.. "

PATRIMOINORAMA Quel regard portez-vous sur l’administration fiscale actuellement ?

Olivier Piétri:

"Le législateur multiplie et empile les instructions fiscales sans simplifier les règles. L’administration fiscale doit s’adapter à ces rapides changements. Des logiciels très performants sont à la disposition des agents mais ils ne sont pas encore suffisamment  optimisés : l’administration agit cependant en ce sens..J’ai de très bons rapports avec mes anciens collègues.
Inspecteur des impôts est un métier passionnant pour ceux qui vivent la fiscalité comme moi comme une passion vivante. Auprès des PME ce métier parfois est proche du contrôle de gestion, les agents n’ont pas qu’une action répressive mais surtout un rôle pédagogique, d’informations, d’aides auprès des chefs d’entreprises. Inspecteur principal, j’avais besoin de trouver un travail beaucoup plus relationnel. Le travail de formateur que d’ailleurs j’exerçais à l’époque comme vacataire à la fois au sein de Sup de Co Rouen, de l’Inseec ou de l’Université d’Aix Marseille me permettait de combler ce manque de contacts extérieurs une fois promu inspecteur principal.
C’est donc naturellement que je suis devenu formateur et conseiller auprès des CGP en créant un cabinet fiscal. Après tant d’années au sein de l’administration, je reste profondément marqué par cette expérience professionnelle que je ne renie pas du tout. Au contraire, je parle toujours « le langage de l’administration fiscale ».
Je comprends plus aisément ce que l’administration exprime instructions, ce qui est passionnant pour moi à communiquer à des néophytes. Mon rôle est de déceler les pièges  et surtout de sécuriser les interprétations  fiscales pour éviter à mes clients de subir les foudres de l’administration."

PATRIMOINORAMA Comment a évolué la clientèle récemment ?

Olivier Piétri :

"La recherche de l’optimisation fiscale n’est plus un but. Elle n’est plus de mise compte tenu de la conjoncture .Au contraire, à présent, tous les clients cherchent la sécurisation fiscale."

Comment faites-vous pour être toujours au fait de l’actualité fiscale?

Olivier Piétri:

"J’ai  plusieurs  collaboratrices qui suivent de près l’évolution les débats parlementaires sur les projets fiscaux en débat, et qui décortiquent les lois et les instructions fiscales ensuite. Nous en discutons ensuite et nous les analysons. Auparavant, je consacrai deux journées par mois à l’étude et à l’analyse de ces évolutions, actuellement, un jour par semaine."

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