28-07-2013
Au terme d'un marathon législatif de près de six mois, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires a été
promulguée et publiée au Journal officiel ce 27 Juillet 2013.
Un rapport
détaillant son impact sur la compétitivité du secteur par rapport aux
banques américaines et européennes est attendu pour fin 2014. Le rapport
devrait inclure également « les conséquences sur la taille et la nature
des opérations des filiales [ainsi que] les volumes des opérations de
négoce à haute fréquence et la spéculation sur les matières premières
agricoles ». La séparation des activités bancaires ne visera donc que les établissements dont les activités
dépassent un certain seuil qui sera ultérieurement déterminé par décret
d’une part et les activités qui restent en dehors du périmètre à
filialiser sont fort nombreuses d’autre part, la régulation bancaire ne sera finalement que très peu chamboulée en France certainement par réalisme pour éviter une délocalisation des activités de marché de nos banques.
Seules les opérations considérées comme extrêmement risquées par les
banques elles-mêmes et uniquement au-delà d’un certain seuil auront donc
à être exécutées par ces filiales dédiées, c’est-à-dire rien ou
presque. Les opérations de négoce à haute fréquence et la spéculation
sur les matières premières agricoles étant par ailleurs exclues… du
périmètre de ces filiales dédiées dont les activités devront être
identifiées pour le 1er juillet 2014 au plus tard et le transfert
effectif intervenir pour le 1er juillet 2015 au plus tard.
Le projet de loi crée d'autre part un mécanisme de résolution des crises bancaires. Il entend limiter la spéculation sur les matières premières agricoles et le trading haute fréquence, obliger les banques à la transparence sur leurs activités dans les paradis fiscaux et limiter certains frais bancaires.
Le sénateur PS Yannick VAUGRENARD, rapporteur pour avis, a ainsi regretté "l'abandon du projet de réforme sur la gouvernance des entreprises qui aurait dû généraliser en France le principe du "say on pay"" forme de contrôle des rémunérations des dirigeants des banques par l'assemblée générale des actionnaires. "Dans un prochain texte il faudra aller plus loin et faire en sorte que le vote de l'AG des actionnaires intervienne avant et ne soit pas seulement consultatif mais décisionnel", souhaite-t-il....
Le risque systémique n'est point écarté par ce texte. La nouvelle loi française est manifestement insuffisante pour éviter une crise telle que celle de 2008, cependant il faudra voir si cette réforme influera sur les débats qui s'ouvriront au niveau européen en septembre. Le texte cherche dans la lignée de la Loi Lagarde à réconcilier le consommateur et sa banque. Il vise à créer une relation de transparence et de confiance avec le consommateur, qui peut être bénéfique : les frais bancaires liés aux découverts sont plafonnés pour tous les consommateurs, à un niveau plus favorable pour les plus fragiles financièrement ; les banques devront prévenir leurs clients quinze jours à l'avance d'un éventuel prélèvement de frais bancaires; une obligation d'information sur les assurances aux crédits immobiliers et consommateurs est instaurée, ainsi que l'obligation de mettre en place des mécanismes de prévention du surendettement ; l'égalité entre les hommes et les femmes pour les tarifs et prestations en matière d'assurance est garantie.Un décret fixera les plafonds des commissions d'intervention à respectivement 8 euros par opération et 80 euros par mois pour l'ensemble des clients, et à 4 euros et 20 euros pour les personnes les plus fragiles, a indiqué le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici.
Dans le cadre de la lutte contre les paradis fiscaux et le
blanchiment des capitaux, un chapitre du titre II de cette loi relatif à
la « transparence et [à la] lutte contre les dérives financières » fait
dorénavant obligation aux banques de publier les informations
détaillées relatives à leurs implantations et activités dans chaque État
et territoire (produit net bancaire et chiffre d’affaires, effectifs,
bénéfice ou perte avant et après impôt de la filiale ou succursale,…).
Les principales mesures du texte
Séparation et régulation des activités bancaires
-- Pas de séparation de la banque de détail et des activités de marché, mais le cantonnement dans une filiale séparée des opérations menées par les banques sur les marchés financiers pour leur propre compte et pour leur seul profit, pour ne pas menacer les dépôts des épargnants. Le ministre de l'Economie aura la possibilité de fixer un seuil au-delà duquel les activités relatives à la tenue de marché d'un établissement de crédit devront être du ressort de la filiale. Interdiction, au sein de la filiale, de réaliser des opérations qui portent sur les matières premières agricoles et sur le négoce à haute fréquence. Resteront dans la maison mère les activités jugées utiles au financement de l'économie, notamment des entreprises (activités liées à la fourniture de service d'investissement à la clientèle, à la compensation d'instruments financiers, à la couverture des risques, à la tenue de marché, à la gestion prudente de trésorerie et aux opérations d'investissement du groupe).
-- Mise en place d'un fonds de garantie et de résolution, financé par les banques et le secteur financier, qui pourra être sollicité pour contribuer à payer le coût des sinistres afin d'éviter de recourir aux finances publiques.
-- Renforcement des pouvoirs de contrôle et d'intervention du "gendarme des banques", l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), qui va devenir l'ACPR (en y ajoutant "et de résolution"). En cas de défaillance d'un établissement, cette autorité pourra notamment changer ses dirigeants, lui imposer de céder ses actifs, scinder ses activités, voire mettre à contribution les actionnaires et certains créanciers. Elle pourra contrôler les garanties apportées pour les prêts bancaires aux hedge funds.
-- Le gouvernement remettra au Parlement, avant le 30 juin 2014, un rapport détaillant l'impact de cette loi sur la compétitivité du secteur bancaire français par rapport aux établissements de crédit américains et européens.
Paradis fiscaux et lutte contre les dérives financières
-- Obligation pour les établissements bancaires de publier, pays par pays, le nom et la nature de leurs activités, leur produit net bancaire, leurs effectifs en personnel, leur bénéfice ou perte avant impôt, le montant total de leurs impôts redevables, les subventions publiques reçues. Une sanction est prévue pour les contrevenants.
Certaines grandes entreprises seront soumises à la même obligation, mais seulement lorsque la Commission européenne aura elle-même légiféré en ce sens.
-- Création de la base légale pour l'échange automatique d'informations fiscales avec d'autres pays.
-- L'AMF peut limiter l'utilisation d'instruments financiers basés sur les matières premières agricoles et publie chaque semaine un rapport sur les acteurs et les volumes échangés sur ce marché
-- Encadrement des acteurs du trading à haute fréquence
-- Pour les dirigeants des banques et personnels tels que les traders, la rémunération variable ne pourra pas dépasser le montant de la rémunération fixe, mais elle pourra atteindre au maximum le double si une large majorité des actionnaires est d'accord.
Collectivités
-- Création d'une Agence de financement des collectivités territoriales
Rémunérations
-- L'assemblée générale des actionnaires sera consultée sur la rémunération des banquiers, en cas de faillite les bonus pourront être annulés
Droits des consommateurs
-- Plafonnement de certains frais bancaires liés aux découverts (les commissions d'intervention 8 euros maximum , 80 euros maximum par mois) pour tous les consommateurs, avec un plafond moins élevé pour les plus fragiles financièrement ( . Les montants maximum par mois et par opération de chacun des plafonds seront fixés par le ministre de l'Economie.
-- Les banques devront prévenir leurs clients 15 jours à l'avance d'un éventuel prélèvement de frais bancaires.
-- Les banques auront l'obligation de transmettre à leurs clients une fiche d'information standardisée sur les assurances liées aux crédits immobiliers et consommateurs.
-- Obligation pour les banques de mettre en place des mécanismes de prévention du surendettement.
-- Dispositions sur l'utilisation du compte d'un défunt pour le paiement des frais liés au décès, ainsi que les conditions de sa clôture, encadrement des contrats obsèques.
-- Egalité entre les hommes et les femmes pour les tarifs et prestations en matière d'assurance
Plus d'infos:
LOI no 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires JO 27 Juillet 2013
Les 100 mesures de la Loi de séparation et de régulation des activités bancaires
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