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Le projet de loi ALUR adopté par le Sénat(26 Octobre 2013) modifie fortement le droit de copropriété

03-11-2013

Le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (« ALUR ») , adopté par le Sénat en première lecture le 26 octobre 2013, modifie sensiblement le droit de la copropriété (particulièrement la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 ) et celui des intermédiaires immobiliers (la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 ) afin d’améliorer la transparence dans la gestion des copropriétés et de restaurer la confiance entre consommateurs et professionnels.

Les sénateurs ont notamment adopté les trois mesures phares du projet de loi Alur :

- l’encadrement des loyers, qui va permettre de faire baisser les loyers excessifs (notamment ceux des logements de petite surface), de contenir l’évolution des prix et protéger le budget des Français ;
- la garantie universelle des loyers : ce dispositif public va protéger les bailleurs contre le risque d’impayés, faciliter l’accès au logement et améliorer la prévention des expulsions ;
- le transfert de la compétence d’élaboration du plan local d’urbanisme au niveau intercommunal, dans des modalités qui font que demain, l’intercommunalité sera la règle et non plus l’exception, mais qui donnent également aux maires des outils pour que leur volonté soit respectée.

Le projet de loi prévoit de renforcer l’encadrement des loyers dans les zones dites "tendues".

Elles correspondent aux 28 agglomérations de plus de 50 000 habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements et soumises à ce titre à la taxe sur les logements vacants. Chacune de ces zones sera dotée d’un observatoire local des loyers, agréé par l’État. Le préfet prendra chaque année un arrêté qui fixera pour chaque catégorie de logement et par quartier, trois indicateurs de loyers : un loyer médian de référence, un loyer médian de référence majoré et un loyer médian de référence minoré.

Le texte prévoit également l’instauration d’une garantie universelle des loyers (Gul),

Destinée à protéger les propriétaires contre les risques d’impayés, à encourager la mise en location de logements vacants et à faciliter l’entrée des locataires dans le logement. Tous les logements du parc privé y compris les meublés sont éligibles à la garantie universelle des loyers. Ce dispositif entrera en vigueur au 1er janvier 2016.


Un nouvel établissement public administratif, l’Agence de la garantie universelle des loyers sera chargé :
• de mettre en place le dispositif de garantie universelle des loyers,
• d’administrer la garantie universelle des loyers,
• de définir les modalités d’organisation de l’accompagnement social des ménages en impayés de loyers.

Justificatifs des locataires

Lors d’une mise en location le texte prévoit, afin de limiter les abus, qu’une liste des justificatifs exigibles d’un locataire sera déterminée. Un formulaire type pour le bail ainsi que pour l’état des lieux sera défini par décret pour améliorer la transparence et l’information de chacun. Cette mesure concernera également la location de meublés.

Marchands de listes et habitat indigne

Pour mettre fin aux dérives liées aux marchands de listes, les logements proposés au sein des listes devront faire l’objet d’un mandat d’exclusivité entre le marchand de liste et le propriétaire.

Le projet de loi prévoit la création du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières qui proposera au ministre de la justice des règles déontologiques pour l’ensemble des professions immobilières et définira le contenu des formations continues obligatoires.

Pour lutter contre l’habitat indigne le projet de loi prévoit que les personnes condamnées pour hébergement contraire à la dignité humaine pourront être condamnées à une interdiction d’achat de biens immobiliers destinés à la location pendant une période de cinq ans.

Par ailleurs pour contraindre les bailleurs qui louent des logements insalubres ou indignes à effectuer des travaux le texte prévoit une astreinte journalière fixée à 1 000 euros par jour de retard pour les bailleurs qui n’auraient pas effectué les travaux prescrits.

Les plans locaux d’urbanisme seront élaborés à l’échelle de l’intercommunalité et non plus de la commune.

Pour répondre à la crise du logement en préservant les espaces naturels et agricoles, le projet de loi entend favoriser la densification des quartiers pavillonnaires, donner un coup d’arrêt à l’artificialisation des sols en favorisant le reclassement en zones naturelles des anciennes zones à urbaniser et enfin lutter contre l’étalement urbain par la maîtrise de l’urbanisme commercial (encadrement des "drive" notamment).

Prévention des expulsions locatives

Dans le cadre de la prévention des expulsions, le projet de loi crée pour les bailleurs personnes morales une obligation de signalement des impayés de loyers auprès des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (Ccapex) au moins deux mois avant assignation, sous peine d’irrecevabilité de celle-ci. Le rôle des Ccapex sera renforcé en matière de coordination, d’évaluation et de pilotage du dispositif de prévention des expulsions locatives et également en tant qu’instance d’examen des situations individuelles.

Habitat participatif

L’habitat participatif sera encouragé et se verra doté de deux statuts juridiques possibles, coopérative d’habitants ou société d’autopromotion.

Habitat mobile

Les documents d’urbanisme seront autorisés à définir les terrains où les résidences mobiles ou démontables (yourte, tipi, mobile home, caravane…) pourront s’installer.

Habitat social

Dans le cadre de l’attribution des logements sociaux des mesures sont prévues pour simplifier les démarches (dépôt de la demande sur internet, constitution d’un dossier unique) et améliorer l’information dispensée aux demandeurs.

Meublés touristiques

Enfin, un amendement voté par l’Assemblée nationale prévoit l’encadrement des locations meublées touristiques.

Trêve hivernale

Parmi les dispositions ajoutées par les sénateurs au texte figure la prolongation de 15 jours la trêve hivernale au cours de laquelle aucune expulsion locative ne peut avoir lieu, jusqu’au 31 mars (au lieu du 15 mars actuellement).

PLan Local d'Urbanisme

Le Sénat a également adopté un amendement qui prévoit le transfert de la compétence d’élaboration des PLU des communes vers les communautés de communes et d’agglomérations, sauf si un quart des communes représentant au moins 10 % de la population s’opposent à ce transfert

Le projet de loi Alur doit maintenant être examiné en deuxième lecture.
 
Les modifications apportées au droit de la copropriété

Plusieurs modifications d’envergure visent à améliorer la gestion administrative des copropriétés, à permettre la réalisation de travaux et à faciliter le redressement des copropriétés dégradées.

La création d’un registre d’immatriculation des copropriétés - Le projet de loi ALUR impose l’immatriculation de chaque syndicat des copropriétaires administrant des immeubles à destination partielle ou totale d’habitation sur un registre des syndicats de copropriétaires. Il prévoit, en cas de non-respect de cette obligation, des sanctions à l’encontre du syndic, qui ne peut les répercuter aux copropriétaires  .   

L’information accrue des copropriétaires et des candidats acquéreurs de lots de copropriété - Le projet de loi ALUR impose au syndic d’établir une fiche synthétique de présentation de la copropriété regroupant les données financières et techniques essentielles relatives à la copropriété et à son bâti. La réalisation de cette fiche synthétique n’est toutefois obligatoire que dans les copropriétés à destination au moins partielle d’habitation ; elle sera accessible à tout copropriétaire et transmise à tout candidat acquéreur .

Le projet de loi fait également obligation au syndic de fournir aux agents immobiliers les informations nécessaires pour faire figurer dans les annonces relatives à la vente d’un lot de copropriété les nouvelles mentions exigées (structure de la copropriété, nombre de lots et de copropriétaires, montant des charges). Aucune sanction n’est prévue, en l’état, en l’absence de ces mentions.

Le syndic doit aussi communiquer aux agents immobiliers et aux notaires les documents utiles à transmettre au futur acquéreur d’un lot de copropriété (fiche synthétique, montant précis des charges courantes et hors budget prévisionnel, état global des impayés, notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires). Le défaut des mentions requises dans la promesse de vente entraîne un report du délai de rétractation , pour ceux pouvant s’en prévaloir.

L’amélioration de la gouvernance au sein de la copropriété - Le projet de loi ALUR pose le principe du maintien du syndic désigné lors de la mise en copropriété de l’immeuble seulement après mise en concurrence préalable de plusieurs syndics et décision de la collectivité de l’assemblée générale . Un contrat-type de syndic sera défini par décret.

Le compte séparé obligatoire – Conformément aux demandes de l’Association des Responsables de Copropriété (ARC) , le projet de loi ALUR oblige le syndic à ouvrir pour chaque copropriété un compte séparé sans possibilité (contrairement à aujourd’hui) de faire voter une dispense par l’assemblée générale ; le syndicat des copropriétaires devient, dès lors, le seul bénéficiaire des éventuels intérêts du compte.

La réforme de la rémunération des syndics de copropriété - Le projet de loi ALUR prévoit, en contradiction avec les dispositions de l’arrêté dit Novelli en date du 19 mars 2010 , que la rémunération du syndic est déterminée de manière forfaitaire. Il est précisé qu’une rémunération spécifique complémentaire pourra être perçue à l’occasion de prestations particulières dans des conditions définies par voie réglementaire.

Les nouvelles mesures de prévention de la dégradation des copropriétés – Une partie des mesures contenues dans le projet de loi ALUR vise les copropriétés dégradées et l’habitat indigne. Le texte propose une définition des copropriétés dégradées. La lutte contre l’habitat indigne est renforcée, dès lors que de tels logements ne peuvent pas être mis en location ; les sanctions contre les marchands de sommeil sont alourdies .

Afin de faciliter la réalisation des travaux de conservation des immeubles, le projet de loi ALUR abaisse les majorités en assemblée générale. La plupart des décisions relatives aux travaux de conservation des immeubles et de mise aux normes d’économie d’énergie pourront être prises à la majorité simple de l’article 24 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 .

Il instaure un fonds de prévoyance obligatoire pour les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation de plus de 10 lots, lequel devra être alimenté par le versement des copropriétaires au moins à hauteur de 3% du budget annuel prévisionnel. Une exception est prévue si le diagnostic technique global de l’immeuble ne fait apparaître aucun besoin de travaux dans les dix prochaines années . Les cotisations à ce nouveau fonds seront garanties par le privilège immobilier spécial prévu à l’article 2374 du Code civil .

La réforme des procédures relatives aux copropriétés en difficulté - Le projet de loi ALUR réforme la procédure d’alerte, mise en place par la loi Molle n°2009-323 du 25 mars 2009, en prévoyant la possibilité de faire désigner un mandataire ad hoc par le président du tribunal de grande instance pour décider de mesures d’urgence dès lors qu’un pourcentage d’impayés de charges est dépassé. Le projet de loi ALUR abaisse le seuil à 15% d’impayés de charges pour les copropriétés de plus de 200 lots (au lieu de 25%) .

Il procède également à une refonte complète des textes relatifs au redressement des copropriétés en difficulté : suspension de l’exigibilité des créances qui peut aller jusqu’à douze mois après l’ordonnance de désignation de l’administrateur provisoire, étant précisé que ce dernier peut obtenir en référé une prorogation dudit délai à trois ans ; suspension ou interdiction de toute action en justice pour les créances antérieures à l’ordonnance de désignation de l’administrateur provisoire visant, notamment, à la condamnation du syndicat des copropriétaires à une sommes d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement; recensement des créanciers avec déclaration des créances par les créanciers dans un délai qui sera fixé par un décret et principe d’inopposabilité des créances non déclarées dans les délais .

Enfin, le projet de loi ALUR crée une procédure nouvelle d’administration provisoire renforcée, lorsque « la situation financière ne permet pas de réaliser les travaux nécessaires pour la conservation et la mise en sécurité de l’immeuble, la protection des occupants, la préservation de leur santé » .

La réforme des textes visant le bail à réhabilitation et la convention d’usufruit de l’article L.253-1 du CCH – Le projet de loi ALUR permet l’application du bail à réhabilitation dans un immeuble soumis au régime de la copropriété . Par ailleurs, il aménage divers aspects, jusqu’alors problématiques, des rapports de la personne morale usufruitière d’un logement et du nu-propriétaire, dans le cadre de la copropriété des immeubles bâtis : représentation des parties à l’assemblée générale, répartition des charges et droits de vote respectifs….

Les modifications apportées à la loi du 2 janvier 1970 dite « loi Hoguet » et son décret d’application du 20 juillet 1972

L’objectif poursuivi est de renforcer la régulation du secteur de la gestion immobilière et du métier de syndic de copropriété afin de « restaurer le lien de confiance entre les professionnels et leurs clients » (sic) .

Une surveillance accrue des intermédiaires immobiliers - L’organisme de garantie financière devra contrôler que la garantie qu’il octroie à un intermédiaire immobilier est d’un niveau au moins égal au minimum légal et au montant maximal des fonds que celui-ci envisage de détenir. Ce contrôle devra être réalisé au moment de l’octroi de la garantie initiale, au moment de la révision annuelle obligatoire mais aussi du renouvellement de la carte professionnelle. A défaut, l’organisme de garantie pourrait engager sa responsabilité à l’égard des clients de l’intermédiaire immobilier ayant subi un dommage .

Il est également envisagé d’instituer des règles et des instances de contrôles spécifiques des activités d’intermédiation immobilières et de mettre en place un code de déontologie juridiquement contraignant. Il est ainsi prévu la création d’un organisme consultatif aux compétences centrées sur l’élaboration des règles déontologiques de la profession et des contours de l’obligation de formation continue ainsi que l’institution d’instances disciplinaires compétentes pour connaître des actions disciplinaires exercées à raison de faits commis par les intermédiaires immobiliers . Le projet de loi ALUR renforce le contrôle administratif exercé par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur les activités des professionnels de l’immobilier.

La modification des conditions d’exercice de la profession - Le projet de loi ALUR entend soumettre l’ensemble des intermédiaires immobiliers (sauf exceptions particulières) à une obligation de formation continue dont le respect dûment justifié conditionnera le renouvellement de la carte professionnelle , étant précisé que la délivrance et le renouvellement de celle-ci sont confiés au président de la chambre du commerce et d’industrie territoriale.

S’agissant des collaborateurs salariés ou indépendants de l’intermédiaire immobilier, le projet de loi ALUR entend ajouter trois nouvelles conditions d’exercice aux exigences classiques à savoir une obligation générale de justifier d’une compétence professionnelle, une obligation pour les collaborateurs indépendants de justifier de la souscription d’une assurance responsabilité civile professionnelle et une interdiction pour les collaborateurs indépendants d’assurer la direction d’un établissement, d’une succursale, d’une agence ou d’un bureau.

Les nouvelles obligations d’information et de transparence - Le projet de loi ALUR oblige à mentionner, dans toute publicité effectuée par une personne visée à l’article 1er de la loi Hoguet quel que soit le support utilisé, le montant toutes taxes comprises de la rémunération de l’intermédiaire restant à la charge de chacune des parties .

Il oblige les intermédiaires immobiliers, qui se livrent ou prêtent leur concours à un acte de location d’un immeuble à usage d’habitation, à communiquer à l’observatoire des loyers territorialement compétent les informations relatives à l’immeuble et au bail .

Enfin, dans le prolongement des dispositions de la loi Molle n°2009-323 du 25 mars 2009, le projet de loi ALUR étend l’obligation d’information qui pèse sur les intermédiaires immobiliers concernant leurs liens directs ou indirects de nature capitalistique ou juridique avec toutes sociétés financières et établissements bancaires et toutes entreprises susceptibles d’intervenir au profit de leurs cocontractants.

Les nouvelles sanctions pénales et administratives - Le projet de loi ALUR consacre de nouvelles sanctions pénales et des sanctions administratives prononcées par la DGCCRF .

Ce projet exprime la volonté du Gouvernement d’améliorer la position des personnes les plus faibles. Il faut espérer qu’une telle réforme globale de l’ensemble des pans du droit relatif au logement n’aura pas pour effet de scléroser le marché immobilier en France.

Un diagnostic définitif ne pourra toutefois être posé qu’après l’adoption définitive du texte et de ses décrets d’application. En effet, des modifications d’envergure sont d’ores-et-déjà annoncées en deuxième lecture. Et de très nombreux dispositifs innovants n’entreront en vigueur qu’après l’adoption de décrets, qui bien plus que la loi elle-même, définiront les contours du paysage textuel de demain.

Source :

Projet de loi n°1179 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, adopté en première lecture par le Sénat le 26 octobre 2013.

Jean-Luc Tixier CSM Bureau Francis Lefebvre Avocat Associé

Charlotte Félizot CSM Bureau Francis Lefebvre

 




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