03-07-2015
Le site 1855.com a même vendu du Château d’Yquem 2012, une cuvée du prince des vins de Sauternes… qui n’existe pas, car il n’a jamais été produit ! Les dirigeants du site de vente de vin en ligne 1855.com, Emeric Sauty de Chalon et Fabien Hyon, deux anciens d’HEC, vont devoir faire face à 11 000 clients mécontents, amateurs mais aussi investisseurs, qui n’ont jamais reçu leurs commandes de bouteilles. Sans parler d’un trou de 40 M€ de dettes dans la gestion de l’entreprise. Une information judiciaire pour escroquerie et détournement de fonds vient d’être ouverte au parquet de Paris.
Ce marchand de vins, un véritable mastodonte du marché en ligne, spécialisé dans les crus de Bordeaux, a été placée en liquidation judiciaire le 9 janvier par le tribunal de commerce de Paris. Un choc dans le milieu : le créateur, Emeric Sauty de Chalon fut désigné entrepreneur modèle de l’année en 2007 par le Sénat et l’école de commerce Essec, alors que la société accusait déjà un trou de 8 M€. Les poursuites s’accumulent contre les dirigeants, qui font l’objet de sanctions administratives par l’Autorité des marchés financiers (AMF), le gendarme de la Bourse .
Créé en 1999, 1855.com se voulait le Hermès du vin. Pour y parvenir et s’imposer sur ce marché, les créateurs ont racheté des concurrents réputés comme ChateauOnline. Cependant, dès 2006, la maison se fissure. Cette société vendait des vins qu’elle ne possédait pas en stock, et leur modèle économique ne pouvait tenir la route .. Emeric Sauty de Chalon et son premier associé Thierry Maicent, ensuite rejoints par Fabien Hyon ont fait de la cavalerie en vendant des grands crus qu'ils ne possédaient point. Cette affaire met en lumière le risque que prend chaque internaute en achetant un article sur internet.Le vendeur internet a t il le produit en stock?
Les frais émoulus de grandes écoles de commerce souhaitaient offrir quelque 25 000 références des domaines français les plus prestigieux. Pour ce faire, ils entendaient travailler sans stock, en s'approvisionnant à réception de la commande du client. Il s ont été largement salués par la presse avant de faire la une de cette affaire judiciaire.
Leur système fonctionne très bien pour les vins "en primeur". D'ordinaire, la vente en primeur permet d'offrir un vin qui mature encore dans une barrique. Le client, qui l'achète sans savoir ce qu'il vaut, bénéficie d'un rabais d'environ 30 %, et le producteur d'un apport de trésorerie.
Dès le début 2013, le site de vente de vin en ligne 1855.com a été poursuivi en justice par l'association des consommateurs UFC-Que choisir pour pratiques commerciales douteuses à la limite de la légalité.
Il reste à savoir où est passé l’argent des clients, car les fournisseurs du site, les rares viticulteurs contactés en direct par 1855.com, n’ont pas été payés non plus.
Depuis avril 2012, les plaintes s’accumulent auprès de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Un signalement de cette administration a été transmis au parquet de Paris, qui avait déjà, de son côté, ouvert une enquête préliminaire dans le passé. La répression des fraudes estime que ce dossier pourrait ouvrir la voie à une action de groupe de la part des consommateurs lésés.
« Neuf clients sur dix ont été servis avec les bouteilles commandées », assure de son côté M e Philippe Blanchetier, l’avocat des dirigeants, qui met en cause « des clients spéculateurs qui ne raisonnaient qu’en termes financiers ». « Ils sont aussi les victimes de l’establishment bordelais, qu’ils ont voulu bousculer et ne les a pas aidés. Eux, ils vendaient du vin plaisir, et certains en ont fait un objet spéculatif », dénonce M e Blanchetier qui plaide déjà « un raté économique ».
Cette affaire nuit à la notoriété et la progression du commerce en ligne. Un encadrement des pouvoirs publics est à craindre à l'avenir pour éviter de nouvelles affaires.
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